Ainsi,
les blondes auraient maille à partir avec l’orthographe si l’on en croit la
Plage de Vie du 31 janvier de La Liberté ! Bien entendu, personne ne prête foi à pareille allégation,
surtout pas son auteur à l’ironie subtile. Il est évident qu’il s’agit d’un
trait d’humour, même si certaines personnes en rient… jaune. En réalité, rien
de permet d’affirmer que la couleur des cheveux exercerait la moindre influence
sur l’intelligence ou l’esprit pratique. Mais ce n’est pas anodin pour
autant : prétendre que la couleur des cheveux, en particulier la blondeur,
impacte l’intelligence produit effectivement des conséquences négatives mesurables.
Des
chercheurs ont mis cet effet en évidence en réunissant une centaine de femmes à
qui ils ont demandé de remplir des questionnaires d’intelligence. Résultat sans
surprise : aucune corrélation n’apparaît entre la couleur des cheveux et
le QI. Dans une deuxième phase, ils reproduisent le protocole avec un autre
groupe de dames, mais en commençant par raconter quelques blagues sur les
bondes pour détendre l’atmosphère. Cette fois-ci, les bondes se révèlent significativement
moins performantes que les autres.
Cet
effet est loin d’être anecdotique. Il a été maintes fois reproduit par la suite :
si l’on active le stéréotype de la blonde nunuche, les femmes à la chevelure
dorée ou ambrée voient leurs performances diminuer. De même qu’il est apparu
que de laisser des petites filles jouer avec une poupée Barbie durant 5 minutes
entraînait une limitation de leurs aspirations professionnelles directement
après. Elles citent alors essentiellement des métiers peu valorisés et moins
bien rétribués traditionnellement associés au sexe féminin (que je préfère ne
pas mentionner ici de peur d’être taxé de sexisme). Il est vrai que cette
poupée incarne le stéréotype d’une femme hypergenrée. Quand bien même on
propose aux filles de jouer avec Barbie médecin, rien n’y fait, les résultats
sont pareillement désespérants.
Le
mécanisme à l’œuvre derrière la malédiction des blondes est maintenant bien décrypté.
La personne visée attribue une partie de ses ressources intellectuelles à
lutter contre les images négatives véhiculées à son encontre : « Non,
ce n’est pas vrai ! Ce n’est pas parce que je suis blonde que je suis bête… »
Autant de ressources perdues pour la tâche demandée.
Depuis
que j’ai pris connaissance de ces recherches, je me méfie des traits d’humour –
des witz comme on dit chez nous – qui dévalorisent une catégorie de gens en
particulier : des Bourbines lents à la comprenette, des femmes dangers publics
au volant, des psys plus timbrés que leurs patients (ben voyons !), etc.
Sous couvert de rigolade, on se fait complice de la transmission de stéréotypes
nocifs et réducteurs.
Alors,
même plus le droit de rire alors que la liberté d’expression est menacée de toute
part ? Si, bien sûr, et plutôt deux fois qu’une, mais quand on a bien
saisi la différence entre rire avec et rire de !
Article paru dans La Liberté le 5 février.
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